La natation synchronisée : immersion sémantique au royaume du pince-nez

par Camille Delaive | le 21 avril 2017

Ne vous a-t-on jamais posé la fatidique question « Tu fais quoi, toi, comme sport ? ». Question d’apparence anodine pour le passionné de foot, l’accro au tennis ou le mordu de volley ; question bien plus problématique lorsque le sport pratiqué, inconnu au bataillon, attire regards surpris, sourcils froncés et questions en rafale. C’est le cas notamment de la natation synchronisée, ce sport méconnu qui a eu son apogée médiatique lorsque Virginie Dedieu, triple championne du monde française, s’est prêtée au jeu de l’exercice publicitaire en vantant les mérites … des tampons Nett en 2004 (!!!). Grand moment de télévision donc qui a valu à la nageuse que je suis de nombreux sourires goguenards de la part des néophytes. Heureusement, des films comme La naissance des Pieuvres ou Parfaites rétablissent l’honneur de ce sport.

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Stéphane Guillon, sarcastique comme toujours, décrit cet honorable sport comme suit « je n’ai pas tout de suite compris de quoi il s’agissait : j’ai d’abord vu une jambe sortir de l’eau ; une seule, puis un bout d’épaule… J’ai cru qu’il s’agissait du film de Steven Spielberg, Les dents de la mer, après le passage du requin ». Mais derrière les clichés qui collent au maillot de cette discipline – que le maquillage prononcé, les sourires figés et les maillots à sequins d’un goût parfois douteux,  ne font rien pour améliorer – il s’agit bel et bien d’un sport. Une pratique sportive qui demande à la fois un très bon niveau de natation (n’oublions pas que cela se passe dans l’eau, il serait malvenu de se noyer), de la souplesse, une bonne apnée – qui dépasse quelquefois l’entendement – ainsi qu’un minimum de sensibilité artistique (le principe initial étant quand même d’être en rythme et …synchro).

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(Les images sont parfois trompeuses, elles sont là de leur plein gré) 

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Mais alors, que se passe-t-il sous la surface ? Une énorme préparation et des techniques barbares pour arriver à cette image de jeunes filles souriantes qui semblent détenir une flottaison naturelle : des longueurs en apnée, des entraînements avec des poids accrochés aux pieds, un pince-nez perpétuellement vissé sur le bout du nez et – jour de championnat, un chignon qui tient avec… de la gélatine alimentaire, laquelle bout paisiblement dans son réchaud, sur le carrelage d’un blanc douteux du vestiaire.

La natation synchronisée, c’est avant tout un sport d’équipe (comme son nom l’indique !) Une vraie complicité s’instaure dans ces équipes qui se côtoient, semaines après semaines, échangent potins dans les vestiaires et astuces au bord du bassin.

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(La synchro, ça rend proche)

Et parce que ce sport n’a pas fini de vous étonner, la natation synchronisée possède un vocabulaire des plus originaux. Allez, petit cours de vocabulaire chloré, pour que vous puissiez briller au bord du bassin, la prochaine fois . D’abord, il y a les niveaux. L’équitation a ses galops, la natation synchronisée a ses marsouins. L’occasion peut être pour le lecteur de (re)découvrir un animal à la faible côte de popularité. Les noms des figures méritent également d’être relevés : certaines appellations sont attendues ( le très original « dauphin » par exemple), d’autres sont imagées, comme  « le flamant rose » (non, nous ne posons pas au fond du bassin avec une jambe repliée) ou le fameux « coup de pied à la lune » et certaines font frémir (le  « barracuda »,  « l’albatros spire », « le périlleux arrière carpé vrille »). Qui pensait qu’il s’agissait d’un sport à risque qui mettait notre sécurité en péril ?

 

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